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un, une

(un, u-n' ; un conserve le son nasal lorsqu'il est suivi d'un autre mot commençant par une consonne ou par une h aspirée : un pour cent, un hameau ; il conserve le même son, bien que suivi d'une voyelle, s'il ne joue pas le rôle d'article indéfini : un et un font deux ; donnez-moi l'un ou l'autre ; un à un ; il se prononce u-n, si devant une voyelle ou une h muette il joue le rôle d'article indéfini : u-n ami, u-n homme ; quelques-uns veulent qu'on prononce eu-n, cette prononciation est vicieuse ; d'autres demandent qu'on prononce un-n homme (en gardant le son nasal) pour distinguer le masculin du féminin ; cette raison n'est pas suffisante contre l'analogie de ces sortes de liaisons. Un garde le son nasal devant oui, huit, huitième, onzième : un oui ou un non, un huit de pique, un huitième accès, un onzième. Il est un cas où un prend une demi-aspiration, c'est-à-dire qu'on n'élide pas l'e dans le : dans 21 le premier chiffre est 2, le second est 1 ; mettez le un avant le deux, et vous aurez 12 ; remarquez qu'ici on ne peut dire : mettez un avant le deux, car cela donnerait 121 ; on ne peut dire non plus : mettez l'un ; car, comme il y a deux chiffres, on croirait que c'est l'un des deux à volonté ; on prononce donc : mettez le un).
  • 1 Adj. numéral. Le premier de tous les nombres. Un, deux, trois. Une, deux, trois. Un et un font deux. Un entre mille. Une entre mille. Il n'en est resté qu'un. Mais, en faisant refus de répondre à nos voeux, Au lieu d'une [nymphe], Myrtil, vous en outragez deux. [Molière, La princesse d'Élide] On peut parier 15162 contre 2378 ou 6 8/23 contre 1, qu'un enfant d'un an vivra un an de plus. [Buffon, Probab. de la vie, Oeuv. t. x, p. 247]

    De un à..., depuis le nombre un jusqu'à.... Des enfants de un à douze ans.

    Substantivement, au masculin. Le chiffre qui marque un. Trois un de suite (111) font cent onze. Ajoutez un un.

  • 2Simple, qui n'admet point de pluralité. La religion est une. La foi est une. Chaque particulier n'est pas assez de n'être qu'un, s'il n'essaye de se multiplier en quelque sorte par le secours de plusieurs. [Guez de Balzac, Ariste, ou De la cour] Notre Dieu est un, infini, parfait, seul digne de venger les crimes et de couronner la vertu. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] La devise un pour tous, tous pour un. [Journal officiel]

    La vérité est toujours une, elle n'est jamais contraire à elle-même.

    Terme de philosophie. L'un ou un, l'unité absolue, infinie. Au sommet dernier de l'échelle de l'être où, sans matière, sans forme.... réside l'innommable unité ; l'un n'est pas beau ; l'un est au-dessus du beau, parce qu'il n'a ni forme ni matière. [Ch. Lévêque, Science du beau, t. II, p. 446] Ce moi de Schelling c'est l'identique absolu, qui est infini en tous sens, le un et le tout. [Ch. Lévêque, ib. t. II, p. 531]

  • 3Où règne l'unité. La France est une. Au théâtre, l'action la plus une a plusieurs parties qui se passent dans des lieux différents. [Lamotte, Réponse à M. de Voltaire.] La nature est une, et se présente toujours la même à ceux qui la savent observer. [Buffon, Hist. min. introd. Oeuv. t. VII, p. 307] Tout sujet est un, et, quelque vaste qu'il soit, il peut être renfermé dans un seul discours. [Buffon, Disc. de réception.] Renfermer dans un système qui soit un, les branches infiniment variées de la science humaine. [D'alembert, Oeuv. t. I, p. 185] Une idée, rendue par plusieurs mots, en est mieux développée ; mais elle ne cesse pas d'être une. [Condillac, Gram. I, 12] Une bataille est une, quoique cent mille hommes d'un côté et cent mille hommes de l'autre en balancent l'événement et se disputent la victoire : voilà l'image de l'action. [Marmontel, Oeuv. t. x, p. 374]

    Substantivement. En un, dans l'unité. Vous [Dieu] êtes de la même sorte dans tout l'univers [que l'âme dans le corps].... faisant concourir en un toutes ses parties. [Bossuet, Élévation à Dieu sur tous les mystères de la religion chrétienne]

  • 4N'être qu'un, ne faire qu'un, se dit de plusieurs personnes ou choses qui ne sont plus considérées que comme uniques. Il n'y a plus maintenant ni de Juif, ni de gentil, ni d'esclave, ni de libre, ni d'homme, ni de femme ; mais vous n'êtes tous qu'un en Jésus-Christ. [Sacy, Bible, St Paul, Épît. aux Galat. III, 28] Père saint, dit-il à son Père, gardez ceux que vous m'avez donnés.... gardez-les, dit-il, afin qu'ils soient un. [Bossuet, Sermons] Vous ne faites qu'un coeur et qu'une âme avec nous. [Racine, Bérénice] On prenait plaisir à voir les deux camps confondus par une amitié si inespérée, et les deux armées qui n'en faisaient plus qu'une. [Fénelon, Télémaque] Notre orgueil et nous ce n'est qu'un, au lieu que nous et notre vertu c'est deux. [Marivaux, La Vie de Marianne, ou les aventures de Madame la comtesse de ***] Vos parcs sont séparés, et vos coeurs ne sont qu'un. [Delille, Les jardins ou L'art d'embellir les paysages]

    En termes de pratique, on disait : Les époux seront uns et communs en bien, pour exprimer qu'il y aurait communauté entre eux.

  • 5C'est un, ce n'est qu'un, il n'y a point de différence, d'intervalle entre.... et entre.... Loin de mon front soient ces palmes communes, Où tout le monde peut aspirer ; Loin les vulgaires fortunes, Où ce n'est qu'un, jouir et désirer ! [Malherbe, V, 27] La fortune a, dit-on, des temples à Surate ; Allons là ; ce fut un de dire et s'embarquer. [La Fontaine, Fables]

    C'est tout un, il n'y a aucune différence. Elle grimpa chez l'aigle, et lui dit : notre mort (Au moins de nos enfants, car c'est tout un aux mères) Ne tardera possible guères. [La Fontaine, Fables] [L'oiseau] Va tout droit imprimer sa griffe Sur le nez de sa majesté. - Quoi ! sur le nez du roi ! - Du roi même en personne. - Il n'avait donc alors ni sceptre ni couronne ? - Quand il en aurait eu, ç'aurait été tout un. [La Fontaine, Fables] Bon ! son épée et rien, madame, c'est tout un. [Montfleury, Fille cap. v, 3] Sauriez-vous un pays où il n'y eût ni gendarmes, ni rats de cave, ni maire, ni procureur du roi, ni zèle, ni appointements (je voulais dire dévouement ; n'importe, c'est tout un). [Courier, Lettres de France et d'Italie]

    C'est tout un, il n'importe, cela est égal. Qu'il m'approuve ou me blâme, ce m'est tout un.

    PROVERBE

    C'est bien tout un, mais ce n'est pas de même.
  • 6Un de, une de..., l'un de, l'une de..., quelqu'un, quelqu'une parmi. Voilà l'un des péchés où mon âme est encline. [Régnier, Satires] J'ai vu les lettres que vous débitez contre celles que j'ai écrites à un de mes amis sur le sujet de votre morale, où l'un des principaux points de votre défense est que.... [Pascal, Les provinciales] Une des choses qu'on imprimait le plus fortement dans l'esprit des Égyptiens était l'estime et l'amour de leur patrie. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] Une des plus belles parties de la milice romaine était qu'on n'y louait point la fausse valeur. [Bossuet, ib. III, 6] Comme ce dessein [de Mithridate, marcher sur Rome] m'a fourni une des scènes qui ont le plus réussi dans ma tragédie. [Racine, Mithridate] L'un d'eux, en blasphémant, vient de nous faire entendre Qu'Abner est dans les fers.... [Racine, Athalie] Les prospérités humaines ont toujours été un des piéges les plus dangereux, dont le démon s'est servi pour perdre les hommes. [Massillon, Petit carême] Je sens seulement qu'il [d'Alembert] est un des plus grands géomètres, un des plus beaux esprits et une des plus belles âmes de l'Europe. [Voltaire, Mél. litt. honnêt. litt. 12] Geber, un des pères de la chimie. [Diderot, Opinions des anciens philosophes]

    L'un de ces jours, un jour très prochain. Je m'offre à vous mener l'un de ces jours à la comédie, si vous voulez. [Molière, Les précieuses ridicules]

  • 7Un, une, quelqu'un, quelqu'une. Un qui doit présuppose un qui a prêté. [Malherbe, le Traité des bienf. de Sénèque, v, 8] J'allais doublant le pas comme un qui fend le vent. [Régnier, Satires] Vous rappelez en moi la souvenance D'un qui s'est vu mon unique souci. [La Fontaine, Orais.] Une avait pris un peintre en mariage. [La Fontaine, Rémois.] Ma fantaisie me fait haïr un qui souffle en mangeant. [Pascal, Pensées] Est-il homme.... qui soit plus aisé à mener bien loin qu'un qui espère, parce qu'il aide lui-même à se tromper ? [Bossuet, Sermons]
  • 8De deux l'un, de trois l'un, etc. un sur deux, un sur trois. Soyons bien buvants, bien mangeants, Nous devons à la mort de trois l'un en dix ans. [La Fontaine, Fables] Comme il était défendu par la loi d'élire le même homme capitaine général plusieurs années de suite, au moins on l'élisait de deux années l'une. [Rollin, Histoire ancienne]

    De deux jours l'un, se dit d'une chose que l'on ne fait qu'une fois en deux jours. N'allant plus au café que de deux jours l'un, et au spectacle que deux fois la semaine. [Rousseau, Les confessions]

    De deux choses l'une, il n'y a pas de milieu.

  • 9Un, une s'emploie pour représenter une personne, une chose dont il vient d'être parlé. On manquait de porteurs ; il s'en présenta un. Vos invincibles mains Ont de monstres sans nombre affranchi les humains ; Mais tout n'est pas détruit, et vous en laissez vivre Un.... votre fils, seigneur, me défend de poursuivre. [Racine, Phèdre] Sans la Phèdre de M. Racine, on ignorerait aujourd'hui que Pradon en a composé une. [Voltaire, Marianne, préface.]

    Vingt pour un, se dit pour exprimer quelque chose qui arrive fréquemment. Sans la sage police qui règne dans Londres, tu te serais déjà fait vingt affaires pour une. [Boissy, Français à Lond. 1]

    Familièrement et elliptiquement. Et d'un, et d'une, première personne, première circonstance, premier fait. Et d'une ! cela commence bien. Et d'un dans nos filets. [Bret, Double extravag. II, 5] Il faut vivre avant de mourir, premièrement et d'un. [Carmontelle, Prov. la Diète, sc. 2] Retournez vers elle, répliqua le maître au valet, et ne lui répliquez de ma part que ce mot : et d'une ! [Comte de Caylus, Acad. de ces dames et de ces mess. t. XII, p. 297]

    Ne faire ni une ni deux, voir DEUX, n° 1.

    Il peut bien la compter pour une, la prochaine fois je ne lui pardonnerai pas. Fig. et familièrement. Il m'en a donné d'une, il m'a attrapé, il m'a dit un mensonge, il m'a fait une fourberie. .... ce bon apôtre Qui veut m'en donner d'une et m'en jouer d'une autre. [Molière, L'étourdi, ou Les contretemps]

  • 10Familièrement et abusivement. Sur les une heure, à une heure environ (on prononce sur l'ê une heure).

    Entre une et deux, entre une heure et deux heures. Enfin les nefs si bien voguèrent, Qu'entre une et deux, après midi.... [Scarron, Virgile travesti]

  • 11Un, une s'emploient très souvent, non pas pour désigner spécialement le nombre, mais pour signifier un objet dont il n'a pas encore été question, et dont on ne nous fait rien connaître, sinon qu'on n'en suppose pas plusieurs ; la plupart des grammairiens le nomment en cet emploi article indéfini. Un paon muait, un geai prit son plumage. [La Fontaine, Fables] Un songe, un rien, tout lui fait peur, Quand il s'agit de ce qu'il aime. [La Fontaine, ib. VIII, 11] Sa maison va être le Louvre des états ; c'est un jeu, une chère, une liberté jour et nuit, qui attirent tout le monde. [Sévigné, 73] Le devoir du nouvelliste est de dire : il y a un tel livre qui court, et qui est imprimé chez Cramoisy. [La Bruyère, I] La grammaire générale de Port-Royal dit que un est article indéfini ; ce mot ne me paraît pas plus article indéfini que tout, article universel, ou ce, cette, ces, articles définis. [Dumars. Oeuv. t. IV, p. 187] Un marquis de Toscane, Adelbert, célèbre par sa femme Théodora, est despotique dans Rome. [Voltaire, Annales de l'Empire depuis Charlemagne]

    Quand un, une a plus d'un adjectif entre lui et le substantif, on ne le répète pas. Un bon et illustre personnage. C'est un pitoyable et insupportable raisonnement. [Bossuet, Instructions sur les états d'oraison] Pourrez-vous soutenir un si triste et si honteux ministère ? [Massillon, Conférences, zèle contre les scandales]

    Cependant on trouve quelques exemples où un est répété. J'aime toujours le P. Rapin ; c'est un bon et un honnête homme. [Sévigné, 28 oct. 1685]

    Un, une se met quelquefois sous une forme exclamative pour exprimer grandeur, excès. Il fait un chaud là dedans ! [Genlis, Théât. d'éd. Bal d'enfants, II, 1]

  • 12Un, une.... suivi d'un superlatif relatif. Voilà une belle merveille de faire bonne chère avec bien de l'argent ! c'est une chose la plus aisée du monde. [Molière, L'avare] Je suis un pauvre pâtre ; et ce m'est trop de gloire Que deux nymphes d'un rang le plus haut du pays Disputent à se faire un époux de mon fils. [Molière, La princesse d'Élide] Une si illustre princesse ne paraîtra dans ce discours que comme un exemple le plus grand qu'on se puisse proposer. [Bossuet, Oraisons funèbres]
  • 13Un, une se met quelquefois devant un nom propre, pour ôter à ce nom propre son sens particulier et en faire une sorte de nom général. Un Pamphile est plein de lui-même, ne se perd pas de vue, ne sort point de l'idée de la grandeur de ses alliances, de sa charge, de sa dignité. [La Bruyère, IX.] Je sors de Zaïre ; des comédiens de province m'ont fait fondre en larmes ; nous avions un Lusignan qui est fort au-dessus de Brizard [acteur des Français], et un Orosmane qui a égalé Lekain en quelques endroits. [Voltaire, Correspondance] Il faut être l'ami d'un Tacite : c'est par un Tacite qu'il faut être loué. [Diderot, Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur les moeurs et les écrits de Sénèque]

    Il se met aussi devant un nom propre pour exprimer une assimilation avec le personnage qu'on nomme. C'est une Lucrèce, elle est aussi chaste que Lucrèce. C'est un Cicéron, il est aussi éloquent que Cicéron.

    S'emploie aussi dans un sens simplement emphatique, pour relever le nom du personnage. Ces saints docteurs, un saint Justin, un saint Irénée, un saint Clément.... qui passaient les jours et les nuits à méditer l'Écriture sainte. [Bossuet, 1er avert. 16] Si quelqu'un eût pu donner de tels mémoires [sur Pierre le Grand], c'eût été un prince Menzicoff, un général Sheremetoff, qui l'ont vu si longtemps dans son intérieur. [Voltaire, Histoire de l'empire de Russie sous Pierre le Grand]

    Il se dit enfin avec une nuance de mépris. Il faut un état, une famille, un nom, un rang, de la consistance enfin, pour faire sensation dans le monde en calomniant ; mais un Basile ! il médirait qu'on ne le croirait pas. [Beaumarchais, Le barbier de Séville, ou La précaution inutile]

  • 14Un se met quelquefois pour tout et pour quiconque. Un chrétien doit faire cela, tout chrétien, quiconque est chrétien doit faire cela. Un homme peut-il s'exprimer de la sorte ? Quiconque est homme peut-il ?....
  • 15L'un et l'autre, l'un ou l'autre, expression pronominale indiquant la pluralité, la division. Je vois, sans me troubler, l'une et l'autre fortune. [Régnier, Satires] À demeurer chez soi l'une et l'autre s'obstine. [La Fontaine, Fables] Le moyen de choisir de deux grandes beautés Égales en naissance et rares qualités ! Rejeter l'une ou l'autre est un crime effroyable. [Molière, La princesse d'Élide] Voilà deux bonnes veuves, Mme de Senneterre et Mme de Leuville : l'une est plus riche que l'autre ; mais l'autre est plus jolie que l'une. [Sévigné, 15 nov. 1671] Par le rapport des deux Testaments on prouve que l'un et l'autre est divin. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] L'un et l'autre, à mon sens, ont le cerveau troublé. [Boileau, Satires] L'un et l'autre rival, s'arrêtant au passage, Se mesure des yeux, s'observe, s'envisage. [Boileau, Le lutrin] Étudiez la cour et connaissez la ville ; L'une et l'autre est toujours en modèles fertile. [Boileau, L'art poétique] Déjà par une porte au public moins connue L'un et l'autre consul vous avaient prévenue. [Racine, Britannicus] L'un et l'autre à la reine ont-ils osé prétendre ? [Racine, Mithridate] L'un [Corneille] élève, étonne, maîtrise, instruit ; l'autre [Racine] plaît, remue, touche, pénètre. [La Bruyère, I] Ainsi périt à l'âge de trente-six ans et demi, Charles XII, roi de Suède, après avoir éprouvé ce que la prospérité a de plus grand, et ce que l'adversité a de plus cruel, sans avoir été amolli par l'une, ni ébranlé un moment par l'autre. [Voltaire, Histoire de Charles XII]

    Être l'un et l'autre, être les deux personnages, les deux choses dont on vient de parler. Est-ce à votre cocher, monsieur, ou bien à votre cuisinier que vous voulez parler ? car je suis l'un et l'autre. [Molière, L'avare]

    Il y a une faute dans cette phrase de Voltaire : On va juger l'affaire [du jésuite Janssens, qui niait un dépôt] ; il faut ou le pendre ou le canoniser ; et peut-être sera-t-il l'un et l'autre ; adieu, mon ami, ne soyons ni l'un ni l'autre, Lett. d'Argens, 15 juill. 1739. L'un et l'autre ne peut se rapporter à deux infinitifs. La phrase deviendrait correcte, si l'on mettait : Il devra être pendu ou canonisé.

    Dire d'un, puis d'un autre, varier dans son langage. Dire d'un, puis d'un autre ; est-ce ainsi que l'on traite Les gens faits comme moi ? [La Fontaine, Fables]

  • 16 Familièrement. Les uns et les autres, tout le monde sans distinction. Il dit aux uns et aux autres toutes ses affaires.
  • 17Ni l'un, ni l'autre. Ni l'un ni l'autre ne viendra, ni l'un ni l'autre ne viendront. [Dictionnaire de l'Académie Française] La postérité jugera qui vaut le mieux des deux [Corneille et Racine] ; car je suis persuadé que les écrits de l'un et de l'autre passeront aux siècles suivants ; mais jusque-là ni l'un ni l'autre ne doit être mis en parallèle avec Euripide et avec Sophocle, puisque leurs ouvrages n'ont point encore le sceau qu'ont les ouvrages d'Euripide et de Sophocle, je veux dire l'approbation de plusieurs siècles. [Boileau, Réflexions critiques sur Longin]

    On met toujours le pluriel, si ni l'un ni l'autre est placé après le verbe. Ils ne sont venus ni l'un ni l'autre.

    On dit aussi : L'un ni l'autre. Les funestes désespoirs de Marcelle et de Flavie, bien que l'une ni l'autre ne fasse pitié.... [Corneille, Théodore et Héraclius] Mais, si l'un parle mal, l'autre va bien agir, Et l'un ni l'autre enfin ne vous fera rougir. [Corneille, Héraclius, empereur d'Orient] Vous n'aurez l'un ni l'autre aucun lieu de vous plaindre. [Molière, La princesse d'Élide] Mais, aussitôt que l'ouvrage eut paru, Plus n'ont voulu l'avoir fait l'un ni l'autre. [Racine, Épigr. Iphig. Leclerc.]

  • 18L'un l'autre, l'une l'autre, les uns les autres, les unes les autres, expressions pronominales qui indiquent réciprocité. En ce monde il se faut l'un l'autre secourir. [La Fontaine, Fables] Entre nous autres auteurs, nous devons parler des ouvrages les uns des autres avec beaucoup de circonspection. [Molière, Critique de l'école des femmes] Auparavant l'on mettait la force et la sûreté de l'empire uniquement dans les troupes, qu'on disposait de manière qu'elles se prêtaient la main les unes les autres. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] Puisse le ciel verser sur toutes vos années Mille prospérités l'une à l'autre enchaînées ! [Racine, Bérénice] Ils [les Romains] y courent [en Asie] en foule ; et, jaloux l'un de l'autre, Désertent leur pays pour inonder le nôtre. [Racine, Mithridate] Tous ses projets semblaient l'un l'autre se détruire. [Racine, Athalie] Un ennemi intérieur et bien plus formidable les pressait vivement ; c'était la faim qui fut telle, qu'ils en vinrent à se manger les uns les autres. [Rollin, Histoire ancienne] Exerçant l'un sur l'autre un mutuel empire, Par les mêmes liens l'un et l'autre s'attire. [Racine L. Relig. v.]

    L'un portant l'autre, l'une portant l'autre, en compensant ce qui est moindre dans l'un avec ce qui est plus considérable dans l'autre. Ces volumes m'ont coûté deux francs, l'un portant l'autre.

    L'un dans l'autre, l'une dans l'autre, même sens. La livre était vendue l'une dans l'autre six livres dix sous.

  • 19Pas un.... pas une..., soit avec ne avant ou après, soit avec sans, aucun, aucune. Et qu'en faveur du sexe ou de la qualité On ne fasse à pas une aucune indignité. [Mairet, Sophonisbe] Tous regardent l'empire ainsi qu'un bien commun, Que chacun veut pour soi, tant qu'il n'est à pas un. [Corneille, Pulchérie] Heureux de ne devoir à pas un domestique Le plaisir ou le gré des soins qu'ils se rendaient. [La Fontaine, Phil. et Bauc.] Pas un seul ne fut épargné. [La Fontaine, Fables] Il se trouva que, sur tous essayée, à pas un d'eux elle [la couronne] ne convenait. [La Fontaine, ib. VI, 6] Ceux des Pays-Bas ne se sont tenus à pas une des confessions de foi qu'on avait faites devant eux. [Bossuet, Histoire des variations des Églises protestantes]Pas un se dit avec la même signification sans ne. Pas un seul petit morceau De mouche ou de vermisseau. [La Fontaine, Fables] Je vous supplie de me croire autant dans vos intérêts que pas une de vos parentes et de vos amis. Mme de Grignan à Bussy, dans SÉV. t. VII, p. 180, éd. RÉGNIER.] Il faut absolument qu'on m'ait ensorcelé ; Si j'en connais pas un, je veux être étranglé. [Racine, Les plaideurs] Sous Louis XI, pas un grand homme. [Voltaire, dans GIRAULT-DUVIVIER]

    PROVERBE

    Qui sert en commun ne sert à pas un, chaque particulier ne prend guère d'intérêt au bien public.
  • 20Plus d'un, terme collectif partitif, qui signifie proprement : une plus grande quantité que un (plus d'un est pour plus qu'un, voir DE, n° 24). Plus d'un guéret s'engraissa Du sang de plus d'une bande. [La Fontaine, Fables] Aux temps les plus féconds en Phrynés, en Laïs, Plus d'une Pénélope honora son pays. [Boileau, Satires] Je me suis vu, madame, enseigner ce chemin, Et par plus d'un héros, et par plus d'un Romain. [Racine, Bérénice] Nous avons plus d'une ancienne pièce, qui, étant corrigée, pourrait passer à la postérité. [Voltaire, Poèmes et épîtres] Plus d'un Mathieu Garo s'érige en novateur ; Lucas est usurier, Colas agioteur. [Delille, Pitié] Tu fus moins scrupuleux dans plus d'une entreprise. [Delavigne, les Enfants d'Édouard, I, 6]

    Comme on voit, plus d'un régit le verbe qui le suit au singulier. Il faut excepter le cas où le verbe serait réciproque. À Paris on voit plus d'un fripon qui se dupent l'un l'autre. [Marmontel, Incas, XLV]

    On exceptera aussi le cas où plus d'un est répété. Plus d'un fils désolé, plus d'une jeune fille en deuil viendront....

    On trouve dans Voltaire un exemple de plus d'un avec le pluriel ; mais cela est contraire à l'usage et aussi à la règle, car plus ne représente pas un pluriel. V. M. sait que plus d'un homme considérable pensent qu'il faut une balance, et que la politique contraire est une politique détestable, Lett. au roi de P. 13 nov. 1757.

    En savoir plus d'un, savoir plus d'un tour, être adroit, rusé. Nous en savons plus d'un, dit-il en les gobant, C'est tour de vieille guerre. [La Fontaine, Fables]

    En avoir vu plus d'une, avoir de l'expérience. Je ne suis pas de ces gens à qui on en fait accroire ; nous en avons vu plus d'une à Moulins. [Picard, Le voyage interrompu]

  • 21Un peu, voir PEU, n° 2.

    Un petit, voir PETIT, n° 18.

  • 22Un à un, l'un après l'autre, et un seul à la fois. Vous, enfants d'Israël, vous serez rassemblés un à un. [Sacy, Bible, Isaïe, XXVII, 12] Impostures dont la liste vous effraierait, si je les comptais une à une. [Voltaire, Phil. Ép. aux Rom. III] Elle [Mme Necker] vient de former dans le faubourg Saint-Germain un hospice où les malades couchés un à un, soignés comme ils le seraient chez une mère tendre.... [Raynal, Histoire philosophique et politiques des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes]

REMARQUE

1. Votre ami est un des hommes qui manquèrent périr. Votre ami est un des hommes qui doit le moins compter sur moi. Dans la première phrase on veut dire votre ami est parmi ceux qui manquèrent périr ; dans la seconde, on veut le mettre à part. En d'autres termes, quand on peut tourner par : est parmi les hommes un qui..., on met le verbe au singulier ; quand on ne le peut pas, on met le verbe au pluriel. C'est une des plus belles actions qu'il ait faites, et non faite. Cette phrase-ci de Ménage est correcte : Je suis un des premiers qui ai imité. [Ménage, dans son édition de Malherbe, p. 560] Je qui ai imité suis un parmi les premiers.De même pour Mme de Sévigné : Vous êtes un des hommes qui me convient le plus. [Sévigné, à Guitaut, 24 oct. 1679] C'est une des personnes du monde qui a le plus de bonnes qualités. [Sévigné, 25 mai 1689] Celle-ci de Montesquieu l'est aussi : Un grand seigneur qui est un des hommes du royaume qui représente le mieux. [Montesquieu, Lettres persanes] : est, parmi les hommes du royaume, un qui représente le mieux. Mais ces phrases de Voiture, de Retz, de Sévigné et de Boileau sont incorrectes ; il y faut le pluriel : Une des causes qui poussa l'un des Gracques à.... [Voiture, Lettres] Ce point d'histoire est un de ceux qui m'a obligé.... [Retz, t. III, liv. IV, p. 500, dans POUGENS] Rien n'est si vrai, et c'est une des raisons qui fait murmurer contre l'impossibilité. [Sévigné, 27 nov. 1689] Je viens d'apprendre en ce moment que M. de Soubise, dont je ne parle point, est un de ceux qui s'y est le plus signalé. [Boileau, Epîtres] À la vérité, dans les exemples de Voiture et de Sévigné, on peut, à la rigueur, défendre le singulier, en disant : parmi les causes une, parmi les raisons une ; mais, comme, de cette façon, causes et raisons ne se trouveraient pas déterminées, le pluriel doit être préféré ; au lieu que, dans la remarque 2, on conçoit qu'on peut dire parmi les hommes, parmi les sciences, au sens absolu.

2. Quant à l'exemple cité ci-dessus : Votre ami est un des hommes qui doit le moins compter sur moi, on remarquera qu'on pourrait aussi mettre le pluriel, ayant dans l'idée : Votre ami est un parmi les hommes qui doivent le moins compter sur moi L'astronomie est une des sciences qui fait le plus ou qui font le plus d'honneur à l'esprit humain, Dict. de l'Acad. qui ajoute : Le dernier est le plus usité. On dira de même suivant l'idée : C'est une des pièces de Molière qui a eu ou qui ont eu le plus de succès. La nuance de l'idée entre le pluriel et le singulier est par exemple dans la phrase de Mme de Sévigné : Vous êtes un des hommes qui me convient le plus : avec le singulier cela signifie que, parmi les hommes, il y en a un qui me convient le plus, et c'est vous ; avec le pluriel cela signifie que vous êtes parmi les hommes qui me conviennent le plus. Le superlatif est, si l'on peut ainsi parler, plus superlatif avec le singulier.

3. On remarquera que, si, au lieu d'être construit avec l'article, le substantif l'était avec le pronom démonstratif, la liberté du choix entre le singulier et le pluriel serait ôtée ; le pluriel seul serait admis par la syntaxe ; et l'on dira, par exemple, en parlant de l'intendant Courtin : C'est un de ces hommes qui ne dorment que quand leur conscience est satisfaite.

4. C'est un de mes enfants qui a eu le prix, c'est un de nos généraux qui a remporté la victoire ; il faut le singulier. Ici on ne peut pas tourner par : un de ceux.

5° à propos de l'expression un de, des grammairiens conseillent de la remplacer par l'un de : 1° au commencement d'une proposition incidente : Ce prince, l'un des plus sages, a pensé ainsi ; 2° quand le substantif destiné à le suivre est sous-entendu : Il charge ses chameaux et monte sur l'un des plus légers ; 3° lorsque le mot qui suit un de est un pronom : L'un de vous me suivra ; 4° si l'on exprimait le sujet et le verbe, un de vaudrait mieux : Cet homme qui était un des héros du parti. Cependant il faut bien dire que ces nuances sont loin d'être toujours observées : Henri IV fut l'un ou un des plus grands rois de France. à ce propos, on remarquera que, l'un appelant facilement l'autre, on dira plutôt l'un que un, quand il n'y a que deux : l'un des consuls.

6. Pour la construction de l'un et l'autre avec le verbe qui y appartient, les grammairiens ont donné la règle suivante : l'un et l'autre est venu signifie qu'ils ont tous les deux fait l'acte de venir ; l'un et l'autre sont venus, qu'ils sont venus en même temps ; l'un et l'autre a fait son devoir, chacun a accompli un devoir particulier ; l'un et l'autre ont fait leur devoir, ils ont accompli le même devoir. Dans le premier cas il y a deux propositions ; dans le second il n'y en a qu'une. Cette distinction est subtile : si l'on prend les exemples, on voit que l'un et l'autre est tantôt considéré comme un sujet simple, tantôt comme deux, suivant l'idée qui prévaut dans l'esprit et suivant l'euphonie. Il est également bien dit : l'un et l'autre vous a obligé, et l'un et l'autre vous ont obligé. [Vaugelas, Remarques sur la langue française]

7. Comme l'un et l'autre, ni l'un ni l'autre veut indifféremment le verbe au singulier ou au pluriel. La Fontaine fut oublié [de Louis XIV], ainsi que Corneille ; ni l'un ni l'autre n'était courtisan. [Laharpe, Cours de litt. t. VII, p. 281] On dirait également : Ni l'un ni l'autre n'étaient courtisans.

8. Des grammairiens disent qu'avec l'un et l'autre suivi d'un substantif, il faut répéter la préposition, et qu'on doit dire non pas : Cet acteur plaît dans l'une et l'autre pièce ; mais dans l'une et dans l'autre pièce. Cependant de bons auteurs n'ont pas répété la préposition. De pareilles frayeurs mon âme est alarmée ; Comme elle [Camille], je perdrai dans l'une et l'autre armée. [Corneille, Horace] Et qui parle le mieux de l'un et l'autre ouvrage. [Molière, La princesse d'Élide] S'étant ensuite informé plus en détail de ce qui s'était passé dans l'une et l'autre armée. [Voltaire, Babouc.]

9. L'un.... l'autre peuvent se dire de noms de différents genres. L'apathie des victimes et l'indifférence des bourreaux étalent également remarquables ; la vie humaine ne semblait avoir de valeur ni pour les unes ni pour les autres. [Lindau, Rev. des Deux-Mondes, 15 avr. 1872, . 935]

10° Il ne faut pas confondre l'un l'autre avec l'un et l'autre. L'un l'autre indique réciprocité, l'un et l'autre indique seulement une circonstance, c'est-à-dire qu'on est deux. Nous parlons l'un et l'autre ; c'est-à-dire nous parlons tous les deux. Nous nous parlons l'un l'autre, c'est-à-dire il me parle et je lui parle. Ils se secoururent l'un l'autre, et non ils se secoururent l'un et l'autre.

11. On a dit que, quand il est question de plus de deux personnes ou de deux choses, l'un l'autre doit se mettre au pluriel. Racine ne s'est pas conformé à cette règle qui, au plus, est valable en prose. Ainsi il a dit : Tous ses projets semblaient l'un l'autre se détruire, Ath. III, 3. Puisse le ciel verser sur toutes vos années Mille prospérités l'une à l'autre enchaînées ! Bérén. v. 7.

12. Quand l'un et l'autre est construit avec un substantif, ce substantif se met toujours au singulier : l'une et l'autre armée, l'un et l'autre rival.

13. Un après un nombre (vingt et un, trente et un, etc.) veut le pluriel : vingt et un chevaux. Autre était la décision de l'Académie au XVIIe siècle : On dit ce mois a trente et un jour, et non pas trente et un jours ; si on y joint un adjectif, il faut dire au pluriel : il y a trente et un jour passés qu'on a reçu de ses lettres, Observ. sur Vaugelas, p. 166, dans POUGENS.

14. On lit dans Mme de Sévigné : C'est avec les deux mille écus de dame de la reine.... vingt-une mille livres de rente qu'elle aura tous les ans, 25 déc. 1676, éd. RÉGNIER. D'autres éditions portent : vingt-un mille. Dans ces cas et cas semblables, c'est un qu'il faut. Un porte non pas sur le nom féminin, mais sur mille.

15. On dit un au pluriel : les uns. Cela paraît contradictoire avec le sens du mot. Voici la filiation de cet emploi : le latin mettait unus au pluriel, quand, malgré ce pluriel, il ne s'agissait que d'une seule chose : satis una superque Vidimus excidia. [Virg. Aen. II] L'ancien français, qui avait du latin l'emploi de unus au pluriel, a étendu cet emploi, et fait de uns, unes, un article indéfini pluriel ; voy. ci-dessous dans Joinville : Unes très grans roches. Cet article indéfini pluriel est devenu sans peine les uns.

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UN. - REM. Ajoutez :16° Lamartine a dit l'une après l'une au lieu de l'une après l'autre : Deux vagues que blanchit le rayon de la lune, D'un mouvement moins doux viennent l'une après l'une, Nouv. Médit. XXIV. Barthélemy, dans sa Lettre à Lamartine (Némésis, 1831), n'a pas passé ce néologisme au poëte, quand il a dit : Suivant de l'oeil, baigné par les flux de la lune, Les vagues à ses pieds mourant l'une après l'une, Et les aigles dans les cieux gris (note de M. Ch. Berthoud).

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